lundi 2 janvier 2017

Etat de la mer

Environnement : La mer comme les autres grands éléments qui constituent la Terre, renferme encore beaucoup d’énigmes même si quelques connaissances nous permettent plus ou moins de la comprendre.
Bon, c’est plein d’eau, il y a du sel, des poissons, des vagues, du courant plus des choses qu’on ne voit pas et d’autres franchement cachées. Parfois elle n'est plus là et après elle revient… Des histoires à faire pâlir tout le monde rodent sur son dôme. Et oui ! Elle est ronde ! Constamment en mouvement, du fait de la pression atmosphérique, de la rotation de la Terre, de l’attraction conjuguée des astres, de la température ou des différences de température, de la profondeur de l’eau, voire des mouvements de plaques tectoniques.
Sont distinguées les mers larges et ouvertes qui sont peu influencées par la géographie et les mers fermées qui subissent facilement les conséquences de facteurs locaux.

Lecture de certains mouvements d'eau, un océan et sa marée :
Assis au bord d’ une pataugeoire barbotez avec les pieds dans l'eau,(réservé à ceux qui savent nager, nostalgique n’est-ce pas ?), ou en étant debout sautez dans l'eau avec l’intention de faire un gros plouf. Chaque fois que vous écrasez l'eau, il y a des vagues qui naissent autour de votre appui et ces vagues se propagent en cercles vers l'extérieur. Si on regarde bien on voit au départ que les vagues, sont proches et courtes, et qu’au fur et à mesure qu’elles s’éloignent de leur source, elles deviennent plus amples puis éclaboussent le bord. Et voilà, vous avez reproduit la propagation de l’onde de marée. Ce que l’on voit moins, c’est que quand les vagues arrivent vers le bord elles ralentissent et deviennent encore plus creuses. Sans compter qu’à l’échelle d’un océan il se passe des choses liées au relief des fonds, aux courants et à la rotation de la terre, à la pression atmosphérique
Présentation vulgarisée du phénomène de marée:
Le niveau de l’océan varie sous l’effet des forces d’interactions gravitationnelles Terre, Lune, Soleil. Depuis Isaac Newton, nous savons que chaque molécule d’eau est attirée par les trois, proportionnellement à la masse de chaque astre et de façon inversement proportionnelle au carré de sa distance. Concrètement, cela forme des bosses et des creux à la surface des océans qui sont les points de départ d’ondes de propagation, les marées, aussi nommées ondes longues de gravité. Très sommairement, les marées seront fortes quand les trois astres sont alignés (syzygie, vives eaux) et plus faibles quant la lune et le soleil forment un angle droit par rapport à la terre (quadrature, mortes eaux). Mais du fait du mouvement des astres, la marée observée à un endroit donné est le résultat de multiples composantes appelées harmoniques, il existe même des points de l’océan, dits «amphidromiques», où la marée est quasi nulle.
On appelle marnage la différence de hauteur entre le sommet et le creux de l’onde.
En un mot, si vous envisagez de naviguer à Tahiti (quelques cm de marnage), vous pouvez sauter ce chapitre, si vous préférez la baie du mont Saint Michel, il faudra être plus attentif (marnage : 14 m).
Quand la mer est basse sur les côtes bretonnes, elle l’est aussi sur les cotes d’en face. Néanmoins, par rapport aux 14m du Mont saint Michel , aux Caraïbes on n’aura qu’ 1 mètre de marnage.
Mieux, en Bretagne on relève deux marées par jour, une seule en extrême Orient et une périodicité mixte en mer d’Arabie selon que les composantes principales sont lunaire, solaire ou mixte.
L’eau en plein océan se soulève sans se déplacer horizontalement, ce qui influence donc peu la navigation, en revanche, en arrivant sur la côte l’onde se trouve tassée par les fonds qui remontent et irrégulièrement freinée par la présence de reliefs, alors elle devient plus haute et ralentit.
La plus grande hauteur d’eau sur la rivage à marée haute matérialise le sommet de l’onde, le creux est représenté par la marée basse.
Le niveau moyen en un lieu donné est à peu près constant, quelle que soit l’amplitude de la marée.
Remarques :
L’analyse des marées va tenir compte de plus de 25 paramètres. Auxquels vont s’ajouter, entre autres, des facteurs géographiques qui vont augmenter ou ralentir sa progression. Elle devient alors particulièrement compliquée à comprendre et à résoudre.
Le rythme des marées en Atlantique est fortement lunaire, en associant un annuaire des marées avec un annuaire lunaire, il est facile d’observer que la Lune est proche de la terre environ trois jours avant la grande marée. Par conséquent, on peut considérer qu’il faut environ trois jours pour que l’influence de la Lune se répercute sur nos côtes, et donc l’onde de marée arrive sur la France environ trois jours après sa naissance.
L’annuaire lunaire est présent sur la plupart des calendriers mais l’annuaire du jardinier est vraiment représentatif.
Si cette vision globale n’est pas bien utile pour faire son petit tour de kayak, cela permet au moins de comprendre que l’efficacité d’un modèle est très dépendante du lieu où l’on se trouve... Plus on en sait, moins on en sait !
Application au kayak :
Heureusement, nous n’avons pas à calculer les marées, les annuaires de marées regroupent pour des ports de références toutes les valeurs de hauteur d’eau aux différentes heures, obtenues par calculs et observations de marégraphie, présentées sous forme de tableaux et d’abaques. Nous aurons juste à appliquer des corrections pour le lieu précis où nous naviguons.
Le tirant d’eau quasi nul d’un kayak rend l’utilisation des ces outils assez simple.
La hauteur d’eau est un nombre décimal positif exprimé en mètres au dessus du zéro hydrographique.
Le zéro hydrographique correspond au niveau d’eau de plus basse mer rencontré en un lieu donné, aux variations météorologiques près (surtout liées au vent).
Sur une carte,le niveau zéro apparaît donc comme une ligne dite « isobathe » longeant la côte à une distance variable.
Du côté mer de cette ligne (en bleu sur les cartes SHOM) on est sûr de pouvoir naviguer en kayak quelle que soit la date. Un changement de couleur net rend cette ligne bien visible. Si par exemple vous trouvez sur la carte une cale qui mène jusqu’à la ligne du 0, inutile de vous creuser la tête, elle est tout le temps en eau.
Du côté terre, c’est l’estran, la partie du sol qui est périodiquement couverte ou découverte. Colorée en vert sur les cartes SHOM, elle est renseignée de nombres soulignés donnant la hauteur du sol au dessus du zéro. Cette information peut vous permettre de calculer l’heure à laquelle vous pourrez y accéder en fonction du marnage à cet endroit. (voir la règle des douzièmes plus loin). Dans la pratique, regardez plutôt où sont les mouillages des petits bateaux dépourvus d’annexe, ce sont les endroits qui découvrent le moins.
Pratique aussi, surtout pour planter sa tente, la ligne dite de côte correspondant à la limite de l’eau lors de la plus haute marée enregistrée au lieu dit. (On passe du vert au brun sur les cartes SHOM)

Attention :
Le 0 hydrographique mathématiquement le plus logique aurait été le niveau à mi-marée qui est indépendant du coefficient de marée, mais cette référence entraînerait des calculs dans de nombreux cas. Il n’est jamais exclu de tomber sur une carte de ce type, notamment dans les musées...
Probablement sur les mêmes cartes, il est possible de rencontrer des hauteurs d’eau indiquées en Fathoms (Abréviation Fm, traduit par Brasses en français) qui font 1,8288 m soit six pieds, soit à peu près l’écartement des deux bras permettant de relever rapidement une profondeur à l’aide d’une corde lestée. Sympa en kayak...

Exemple: Un jour à St Nazaire on observe un coefficient de 91 et une hauteur de 5,8 mètres à 3h 49. Alors qu’à Brest, soit à 300 Km, avec un coefficient identique, la marée atteignait une hauteur de 6,9 mètres à 3 h 59. A Paimpol à environ 150 Km de Brest où le coefficient est aussi de 91, elle était haute de 10,6 mètres à 5 h 56.
Dans ces trois ports le coefficient de marée était de 91. Pour résumer voici les observations que l’on a pu faire le même jour :
Ville
Distance de Brest
Hauteur de la pleine mer
Heure de la pleine mer
Brest
0
6,9m
3h59
St Nazaire
300km
5,8m
3h49
Paimpol
150km
10,6m
5h56
On constate que pour le même coefficient, l’heure et la hauteur de la pleine mer sont différentes... « Bravo ! »

Présentation des coefficients de marée, les fameux coef ! :
Les coefficients de marée sont calculés pour le port de Brest et considérés comme identiques sur les côtes atlantiques et de la Manche car l'onde de marée est faiblement perturbée.
Le coef 100 a été pris pour représenter la valeur moyenne du marnage pour les marées de vive-eau d'équinoxe, soit 6,1m à Brest
Les coefficients dits de « vives eaux » vont de 70 à 120 (V.E. sur certaines annuaires).
La mer monte alors beaucoup et descend beaucoup aussi.
La moyenne, 95 est dite marée de vives-eaux moyennes.
Les coefficients dits de « mortes eaux » vont de 20 à 70 (M.E. sur ces mêmes annuaires).
La mer monte et descend moins.
La moyenne, 45 est dite marée de mortes-eaux moyennes.
Ce vocabulaire date de l’époque où peu de marins savaient compter, mais est encore très utilisé maintenant.

Exemple : Cela signifie qu'à Boulogne par exemple, pour un coef’ de 33, la marée basse atteindra une hauteur de 2,5 mètres et la marée haute 6,8 mètres alors que pour un coef’ de 110 elle baissera jusqu'à 0,9 mètre et montera à 9,3 mètres.

La règle des douzièmes :
Si la mer monte et descend, elle ne le fait pas de façon régulière. C'est un peu comme certains qui commencent leur journée. Ils démarrent doucement puis quand ils sont disposés, chauds, ils en mettent un bon coup. Puis avant la fin de la journée, ils ralentissent histoire de ne pas en faire de trop ou de dire qu’ils en ont fait assez avant. Pour descendre, la mer refait aussi la même chose, selon un cycle pseudo sinusoïdal. (NDLR : J’ignorai totalement que j’étais pseudo sinusoïdal.)
Voici deux explications imagées de cette particularité :
La marée se lance en première donc elle ne va pas très vite puis passe en seconde et prend de la vitesse pour passer la troisième à mi-marée. Pour conserver le contrôle elle lève ensuite le pied pour ajuster et atteindre l'étale suivante à l'heure précise.
C’est aussi comparable à une glissade sur des montagnes russe, ça va vite en descendant et l’élan atteint s’essouffle en arrivant aux sommet de la montée suivante
Et un peu de vécu :
-« Il faut environ 12 heures pour un cycle complet, soit environ 6h de montante et 6h de descendante. Comme il n’y a pas de congé pour la mer c’est tous les jours pareil ! »
-«  Oui mais à grosse marée, il y a beaucoup d’eau à bouger alors que à petite coef c’est le contraire, comment fait-elle? »
-«  En fait, par petit coefficient ou par mortes-eaux, 12 heures sont de trop pour déplacer peu d'eau. Alors la mer attend à la marée haute ou plein mer (PM) ou basse mer (BM). On dit alors qu’elle est à « l'étale » cette renverse très lente donne l’impression qu’il ne se passe rien sur la hauteur de l’eau. Quand c’est en vives eaux (ou lune montante pour les jardiniers) les volumes d'eau à déplacer sont alors plus importants, donc ça prend plus de temps et il n’y a alors presque plus d’étale. Dans ce cas, la mer redémarre le cycle inverse donc renverse sans attendre .»
- Mode opératoire :
Dans les zones à fort marnage, il faut être vigilant quand les coefficients sont forts, même avec nos petits bateaux au tirant d'eau très faible que nous pouvons toujours porter à pied sec. En effet si l'eau était près du parking quand nous avons embarqué à marée haute, il se peut bien qu’un désert de sable ou de vase , ou un mur de galets .se présente entre nous et le rivage quelques heures plus tard pour agrémenter notre retour ! Il est donc important d’être familiarisé avec les systèmes de marée et de bien se souvenir que la variation de hauteur d'eau est plus rapide à mi-marée.
Estimation de la hauteur d’eau par apport à un horaire :
Entre marée haute et marée basse, il se passe environ 6 heures.
Comme la variation de hauteur d’eau n’est pas régulière, on diviser sa variation en 12 parts égales au lieu de 6.
Première heure : 1/12 de la hauteur
Deuxième heure : 2/12 de la hauteur
Troisième heure : 3/12 de la hauteur
Quatrième heure : 3/12 de la hauteur
Cinquième heure : 2/12 de la hauteur
Sixième heure : 1/12 de la hauteur
Soient 1/12 +2/12+3/12+3/12+2/12+1/12= 12/12 !


Gérer la marée: Si la mer est entre autres sous l'influence de la lune et du soleil, ce qui va vraiment nous intéresser, c'est de savoir s'il y a de l'eau à l'endroit choisi et son sens de circulation :
Concrètement, un exemple : J'embarque aujourd'hui d'une cale, et il est maintenant pleine mer plus 4 heures avec un marnage de 6 m (différence de hauteur entre pleine et basse mer). Avant de m'éloigner, je mesure la profondeur de l'eau au bout de la cale en trempant ma pagaie verticale dans l'eau. Résultat : environ 1 mètre d'eau. Je sais que sur la 5è et la 6è heure de marée, l'eau va descendre de 3/12 du marnage, soit 1,5m. Autrement dit, à marée basse, l'eau sera 50 cm en dessous de la cale, c'est à dire relativement loin dans la vase !.. Beurk ! Pas de panique, il suffira d'arriver 1 heure après la marée basse, l'eau aura remonté d'1/12 de marnage, soit exactement les 50 cm dont j'ai besoin. Voilà, je dispose de 2 heures de descendante plus 1 heure de montante pour me balader. Trop bien, surtout si la nuit ne tombe pas avant ! Rassurons les lecteurs effrayés, au début on se fie aux copains, et au bout d'un moment, on n'a même plus besoin de faire le calcul, le célèbre pifomètre se charge de tout, avec quelques sympathiques ratés pour animer les conversations à la veillée.

Remarque :Vous avez compris que si cette préparation n'est pas indispensable sur tous les programmes, elle le sera en cas de navigation sur les zones à fort marnage ou pour débarquer sur la rive des estuaires (pour éviter la vase), ou encore dans des baies qui découvrent à marée basse ou encore par rapport à des pointes rocheuses submersibles qui imposent de longs détours à marée basse

Mode opératoire : Si vous n'êtes pas équipé d’un annuaire du SCHOM pour les marées ou de l’almanach du marin breton, vous en trouverez un au bureau de tabac du site de navigation. Sinon c’est dans le journal du coin ou à la capitainerie, car l’annuaire du pêcheur de moules de Pénéstin ne convient pas à St Malo. Sur internet vous trouverez les marées exactes pour pratiquement tous les embarquements, ce qui vous évitera d’appliquer les correctifs par rapport à l’annuaire du port de référence.

Variables: L’annuaire de marée est précis, mais calculées à une pression atmosphérique moyenne et évidemment sans tenir compte du vent. La réalité observée sur place peut révéler quelques variations du fait des nombreuses interactions entre les éléments vues précédemment.
Le vent peut influencer la marée en l’avançant ou en la retardant et en modifiant les hauteurs d’eau.
Les vagues et la houle se chargent de mouiller la côte beaucoup plus haut que le niveau théorique de marée haute.
Dans les estuaires, en fonction du débit du fleuve des différences peuvent se faire sentir. Des compléments d’informations sont disponibles à la capitainerie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire